Réparer et embellir
La vie de nos objets, comme la nôtre, est ponctuée d'événements qui participent à leur histoire. Et comme nous, ils subissent parfois des déboires...
Cassures, fêlures et ébréchures témoignent de leur usage. Doit-on pour autant s'en débarrasser ?
Au Japon, l'art du Kintsugi consiste en une réparation des objets avec une laque végétale suivie d'un recouvrement des traces apparentes de poudre d'or, pour sublimer les marques, témoins de l'histoire de l'objet.
Librement inspirée de cette technique prônant la résilience, je répare les objets en céramiques, bois, pierre... Et embellis leurs fractures.
La méthode




Réparation
Embellissement


L'état d'esprit
Pour la réparation, pas de fantaisie : je respecte la méthode du kintsugi. J'utilise donc la laque urushi, issue d'un arbre, le Toxicodendron. Si la sève, comme le nom de l'arbre l'indique, est extrêmement irritante, elle devient parfaitement inoffensive une fois durcie dans les conditions adéquates, à savoir une température située entre 25 et 30°C, et une hygrométrie entre 70 et 80%.
Plusieurs étapes sont nécessaires.
D'abord le collage des pièces en mélangeant la laque avec de la farine de blé.
Vient ensuite le comblement des espaces voire la construction si trop de pièces sont manquantes. Je peux aussi être amenée à insérer des pièces provenant d'autres objets, retaillées pour combler un espace important. Cette étape est toujours réalisée avec de la laque urushi et une terre adaptée au besoin : de la terre "tonoko" utilisée au Japon pour les importantes constructions au fin kaolin pour combler des espaces sur la porcelaine.
Une fois l'objet reconstitué, reste la finition. L'embellissement des coutures peut être fait de diverses façons :
- la plus connue reste la poudre d'or, traditionnellement utilisée dans l'art du kintsugi. L'or 24 carats utilisé est le seul qui permette de garantir un usage pour le contact alimentaire. Bien sûr, il reste aussi le plus onéreux.
- la poudre d'argent, de cuivre ou de laiton permettent d'obtenir des teintes différentes, permettant de s'harmoniser au mieux avec l'objet réparé.
- l'urushisugi consiste en un simple laquage de la couture. On obtient alors une cicatrice rouge ou noire brillante.
Tous les objets qui me sont confiés sont traités de la même façon : que vous me confiiez un vase Ming ou le mug de votre grand-tante. Ce n'est pas la valeur de l'objet en lui-même qui importe, mais celle que vous lui accordez en souhaitant le faire revivre malgré ses fractures. Ainsi, ce qui détermine le prix d'une réparation ne dépend pas de la valeur de l'objet brisé mais du temps nécessaire pour le réparer, de la nécessité ou non de procéder à de la reconstruction ou du comblement avec des pièces extérieures, et de la nature de la finition souhaitée.